Article à lire "S"adresser à la honte pour la désincarcérer"
CF- émission du 22 février 2017 (intervention d'Elisabeth SCHMITLIN)
Médiation familiale en prison ?
Problématique
La médiation intervient dans un contexte où les préventions et les revendications sont portées à l’incandescence. Les conflits sont portés à un point de très grande intensité car la personne détenue est sans action sur les personnes dehors et subit un cadre où elle a tout contre elle.
- Le côté novateur de cette action de médiation familiale en prison ? Que la prison soit l’occasion d’une parole que les personnes détenues et leur famille n’auraient jamais crue possible ; c’est le côté innovant et paradoxal de cette action, que ce temps d’incarcération n’ait pas été neutre, englouti…
- Le côté pertinent de cette même action ? Dans ce milieu répétitif, il est important de créer des évènements dont les personnes détenues soient les auteurs et les garants comme lors des protocoles d’accords rédigés et signés en entretien commun. Ce travail a un rythme, ses exigences et sa rigueur.
- Dans le cadre de la loi TAUBIRA sur la contrainte pénale du 15 août 2014, la médiation familiale se trouve être au cœur de ce que la justice voudrait obtenir : une harmonisation afin que la personne détenue soit considérée dans sa globalité.
Deux espaces antinomiques
La médiation familiale et la prison apparaissent comme deux espaces antlnomiques...
- la médiation familiale : un espace relationnel qui favorise le débat, autour de ce qui fait lien et autour de ce qui sépare
- la prison : un espace rétréci, de clôture et de limite où la parole est contenue, voire contrôlée.
Au quotidien
La réalité carcérale complique le lien familial d'un point de vue concret... L'enjeu est d'éviter que la personne détenue ne se déconnecte de ce lien social essentiel.
Or, il y a de fait, un éloignement physique et une différence de nature dans le vécu du temps :
- à l'intérieur, la parent détenu vit dans un tempo répétitif
- à l'extérieur, l'autre parent se trouve dans un tempo linéaire au milieu de situations d'actions de vie et de problèmes quotidiens.
Chacun des deux parents, fort naturellement, reste dans la logique de son tempo.
La médiation familiale peut accompagner deux parents mais aussi un fils, une fille incarcérés et leurs parents, voire leurs grands-parents ou autres.
Comme pour Clara, 18 ans, 1ère incarcération :
"Je leur tendais la main, mes parents me tendaient la main mais nous n'osions pas...nous ne savions pas comment se la prendre, se la redonner..."
Concrètement
Sachant que les décompensations sont liées aux relations familiales, la médiation familiale est au coeur de ce qu'il convient de faire pour permettre aux personnes de traverser cette épreuve ; en effet, l'expérience d'une médiation navette et d'entretiens communs montre que la prise de conscience du décalage temporel et des obstacles à la parentalité dus à l'enfermement peuvent être pris en compte.
En cela, la médiation familiale :
- est une réponse suffisamment souple et ouverte pour le parent détenu et l'autre parent, lesquels, par eux-mêmes, peuvent rechercher des solutions concrètes et adaptées, les transcrire sous forme de protocole d'accords pouvant être homologué par un juge ;
- participe à un apaisement en détention, une prévention du suicide et une meilleure réinsertion sociétale et, par voie de conséquence, une prévention de la récidive de la délinquance plus profonde notamment en matière de violences (faites aux femmes, intraconjugales et intrafamiliales).
Ce processus est possible à tout moment de la détention dans les limites pénales établies.
Ainsi, pourront être maintenus, rétablis, voire même établis, le dialogue et différentes fonctions parentales.
Pour Raf, 22 ans, 1ère incarcération :
"Vous savez Madame, votre taf, il déchire !!"
Les membres du conseil d'administration
Pierre Jakob, président
Jacques Saliba
Jean-Claude Sury
Vincent Allais, Secrétaire-Trésorier
Alice Ouaknine
Les médiateurs familiaux exerçant en prison
Outre leur participation au groupe de réflexion, les médeurs familiaux (DE) interviennent dans des établissements pénitentiaires
Elisabeth Schmitlin
Prison de La Santé (75)
Valérie Clochard-Grandon
Prison de Saintes (17) et
Prison de Bédenac (17)
Muriel Lerond
Prison de Joux-La-Ville (89) et Prison d'Auxerre (89)
Pierre Yonli
Service Pénitentiaire d'Insertion et de Probation de Paris (75)
Fanny Chaligné
Centre Pénitentiaire Orléans-Saran (45)
Mariella Arbulu
Centre Pénitentiaire Orléans-Saran (45)
Laure Manodoro
Centre de Détention de Châteaudun (28)
Et la médiation pénale ?
C’est un dispositif judiciaire particulier, hors activités de MOP :
- Alternative aux poursuites, la médiation pénale constitue une réponse judiciaire à certaines infractions.
- Le litige doit avoir fait l'objet d'une plainte. Les faits sont simples, clairement établis, reconnus et constitutifs d'une infraction pas trop grave (contraventions et petits délits)
- Elle peut être mise en place à l’initiative du Procureur de la République, à la demande ou avec l'accord de la victime et concerne les délits suivants : injures, menaces, tapage nocturne,, violence légère, vol simple, dégradation mobilière ou immobilière, non-paiement de pension alimentaire et non-représentation d'enfant
- Mise en œuvre par un médiateur pénal, elle se déroule dans un tribunal, une association, une maison de justice et du droit ou une antenne de justice